A chaque info pourave qui me tombe dans l'oreille ou que je lis, ce qui me vient à l'esprit c'est : y a plus d'morale mon bon monsieur !

Ah qu'il n'est point simple ce petit mot si pluriel de définition ; c'est un coup à douter de notre belle langue car il revêt des significations fort diverses selon le côté où l'on se place. La morale du curé ne sera pas celle du libéral. L'ordre moral résume un fatras étriqué de préceptes à l'usage du vieux ronchon conservateur borné. Les fables moralistes m'emmerdent un peu… et oui même quand c'est Renard, mon roué cousin, qui gagne un clacos qui pue chouravé à cette andouille de corbac vaniteux.

Alors quoi… le dico pardi ! Arf…… ça s'arrange pas, des pages et des pages……

Copions l'Académie : "Qui a rapport aux mœurs, aux coutumes, traditions et habitudes de vie propres à une société, à une époque."  Ah les mœurs, elles évoluent fort heureusement, les traditions c'est un bazar difficile à gérer ; au prétexte que "ça se faisait avant" on accepte ou tolère d'imbéciles horreurs… quant à supporter les machins folkloriques, houlaaaaa… sans moi, merci !

Paragraphe suivant : "Qui concerne les règles ou principes de conduite, la recherche d'un bien idéal, individuel ou collectif, dans une société donnée." Mieux, plus net et concis. Un brin de chipotage néanmoins, j'aurais volontiers préféré individuel ET collectif, l'un ne va pas sans l'autre il me semble ; l'individu doit sa tentative de bien idéal autant au développement de ses qualités qu'à celles de l'ensemble d'individus qu'il côtoie, avec lequel il évolue et la façon dont les deux entités se respectent. Monsieur Littré m'annonce : "qui concerne les mœurs", c'est court ; après ça il m'en tartine des pages en citations diverses qui emberlificotent en complexifiant. Les mœurs c'est vague comme déjà vu plus haut, passons.

La morale, sitôt citée elle devrait caractériser un principe, pas simple. Sa définition ne peut se préciser que dans le contexte énoncé.

Allez l'Académie sois pas vache, encore un coup de pouce s'te plait  :"qui a pour but l'éducation, l'élévation du sens moral." Euh…… ça se précise ? Question éducation et sens moral, je m'en suis bouffée des brouettes dont j'ai vidé une bonne part dans le tas de fumier alors quoi…… le sens moral nous montre ce qui est bien, faut suivre la flèche là c'est bien sans discutailler ? Ce qui est bien-pas bien, juste-injuste n'est pas facile à cerner ; mon bien à moi n'est pas censé être bien pour tous. 

Faut élargir le champ. Si je vire sans ménagements les convenances bourgeoises, le sens du devoir aveuglant ou les codes respectés sans réflexion ni remise en question, les enseignements obligatoires souvent discutables, il reste un bon peu d'outils qu'il serait judicieux de remettre en marche et rapido en plus !

Remettre au goût du jour la probité, la déontologie, l'honnêteté au sens de l'honnête homme du XVIIIème siècle, un rêve qui, s'il s'avérait, serait une véritable révolution. La fin de l'histoire ça serait ! Pas comme a bien voulu nous l'annoncer ce salopard de Fukuyama non, simplement tout le contraire. Finie la dictature de la main invisible du marché dans la culotte du zouave, des actionnaires avides de ne rien branler avec la thune pompée aux producteurs, des pleurnicheurs du CAC qu'ont tout plein du soucis pour changer les pneus des Rolls s'ils n'augmentent pas leurs traitements de tas de pour-cent chaque année en oubliant à qui ils doivent leur position, des banquiers qui reçoivent tant et revendent si peu pour si cher, etc……

Ah non, je n'ai rien contre les Rolls, j'aime beaucoup ; c'est très confortable, silencieux et ça braque serré mais il ne serait pas question que je puisse rouler dans un bel engin du genre s'il fut acquis en saignant des types, voilà c'est ça un bout de ma morale. Je ne suis rien qu'une andouille de vieille goupil pas à la mode.

Si, près de chaque acte a commettre, on soupesait la chose un instant… ça ne va pas produire dols et tromperies ?… c'est légitime ?… c'est honnête ?…

En un mot est-ce moral ?…

Pas simple en ce moment, il suffirait pourtant d'avoir un peu moins envie de bourrer des coffres-forts, diriger, commander, régner.

Remplacer par partager, orienter, conduire serait-ce une mutation si complexe ?

El Sup' commandante Marcos résumait sa morale ainsi : "commander en obéissant"

Arf, c'est pas gagné…

En guise de conclusion,

un poème de Pierre François Lacenaire……

une certaine idée de la morale peut-être…

 

Sire, de grâce, écoutez-moi :
Sire, je reviens des galères...
Je suis voleur, vous êtes roi,
Agissons ensemble en bons frères.
Les gens de bien me font horreur,
J'ai le cœur dur et l'âme vile,
Je suis sans pitié, sans honneur :
Ah ! faites-moi sergent de ville.

 

Bon ! je me vois déjà sergent :
Mais, sire, c'est bien peu, je pense.
L'appétit me vient en mangeant :
Allons, sire, un peu d'indulgence.
Je suis hargneux comme un roquet,
D'un vieux singe j'ai la malice ;
En France, je vaudrais Gisquet :
Faites-moi préfet de police.

 

Grands dieux ! que je suis bon préfet !
Toute prison est trop petite.
Ce métier pourtant n'est pas fait,
Je le sens bien, pour mon mérite.
Je sais dévorer un budget,
Je sais embrouiller un registre ;
Je signerai : " Votre sujet ",
Ah ! sire, faites-moi ministre.

 

Sire, que Votre Majesté
Ne se mette pas en colère !
Je compte sur votre bonté ;
Car ma demande est téméraire.
Je suis hypocrite et vilain,
Ma douceur n'est qu'une grimace ;
J'ai fait... se pendre mon cousin :
Sire, cédez-moi votre place.

 

28 novembre 2012