C'est bien le jour tiens ! 1er mai, fête des travailleurs qui ne se rendent pas compte que s'il n'y avait pas à travailler, ça serait fête tous les jours. Commémoration de luttes un peu trop oubliées déjà évoquées par là.

Fainéant, c'est facile à piger : qui fait néant, queudalle, nada, nib… ah mon rêve absolu ! Qu'on peut écrire plus populaire : feignant déclinable en un feignasse de bon aloi, un adjectif tout-à-fait digne et créateur. Si Newton n'avait pas fainéanté sous son pommier, hein… si Archimède ne se l'était pas coulée douce dans son baquet, alors… Si Galilée le soir tombé n'avait pas bayé aux corneilles à sa fenêtre, et bien…

La fainéantise est un art hautement civilisé pratiqué par le fainéant. Art si conséquent qu'il possède un pacson de synonymes en bon français bien propret et en argot : paresseux, cossard, tire-au-flan, branleur, flemmard, oisif, propre à rien, tire-au-cul, cagnard……

"La vie est courte. Le travail est pour ceux qui ne la comprendront jamais. La fainéantise ne dégrade pas l'homme. À qui voit juste, elle diffère de la paresse."  Oh mais que c'est futé ! La fainéantise diffère de la paresse, ça c'est une notion qu'elle est bonne si on y réfléchit un peu… en feignantant. C'est René Maran qui a écrit cette intelligente phrase dans son bouquin "Batouala" couronné par le prix Goncourt en 1921…… nan j'la ramène pas ma science, je viens de le découvrir cet écrivain en farfouillant à la recherche de pensées autour de la fainéantise. C'est la phrase la plus habile que j'ai trouvée et puis ce Maran doit être quelque peu recommandable, un copain à Eboué ou Césaire ne peut pas être complètement mauvais.

Question valeurs sûres, on peut toujours se reporter à Paul Lafargue et son "le droit à la paresse : réfutation du droit au travail" ça commence comme ça :

"Une étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste. Cette folie traine à sa suite des misères individuelles et sociales qui, depuis des siècles, torturent la triste humanité. Cette folie est l'amour du travail, la passion moribonde du travail, poussée jusqu'à l'épuisement des forces vitales de l'individu et de sa progéniture."

Après ça se gâte un peu, enfin je veux dire que ça a vachement vieilli. Proposer la journée de trois heures en 1880… quand même ça décoiffe !

"… quiconque donne son travail pour de l'argent se vend lui-même et se met au rang des esclaves." qu'il a dit Cicéron…  et toc !

On a beau dire et beau savoir, on doit y aller au turbin, au taf, au trimard, au boulot, au chagrin, au tapin, se vendre comme esclave… et zutre, faudrait quand même s'y mettre un jour à la fainéantise novatrice, celle qui entraverait le travail bien comme il faut et sans rémission.

C'est un art que je ne possède pas la fainéantise, je me le reproche assez mais pas moyen ;  quels efforts me coûtent quelques minutes d'oisiveté ! C'est peut-être pour ça que j'admire le fainéant, on est avide de ce qu'on ne sait pas accomplir.

Je laisse la note de fin à une chanson de Coluche :

A toi l'enfant qui vient de naître
je dois dire pour être honnête
Que c'est pas en travaillant
Qu'on trouve le bonheur sur Terre
J'en veux l'exemple que mon père
Qui vit l'jour de son enterr'ment
Qu'il était l'plus riche du cim'tière

 

Sois fainéant sois fainéant
Tu vivras content
Sois fainéant, sois fainéant
L'avenir t'attend

 

Plutôt que d'apprendre à l'école
Baise et collectionne les véroles
La méd'cine fait quelques progrès
Tandis qu'à gagner du bagage
Tu n'aboutis qu'au chômage
Où déjà sont entassés
Ceux qu'ont cru en la société

 

Sois fainéant, sois fainéant
Tu vivras content
Sois fainéant, sois fainéant
L'avenir t'attend

 

Moins tu en fais, plus tu l'espères
Plus ta santé déjà précaire
Te libère de ses tourments
Gagner ta vie ne vaut pas l'coup
Attendu que tu l'as déjà
Le boulot y en a pas beaucoup
Faut le laisser à ceux qui aiment ça

 

Sois fainéant, sois fainéant
Tu vivras content
Sois fainéant, sois fainéant,
L'avenir t'attend

 

Si jamais tu voles un copain
Tu en auras moins de chagrin
Que si tu n'as pas à manger
Et si t'as la main sur le cœur
N'hésite pas à la couper
Tu entendras moins les moqueurs
Si c'est toi qui les a roulés

 

Sois fainéant, sois fainéant
Tu vivras content
Sois fainéant, sois fainéant.
L'avenir t'attend

 

Si jamais tu voles un couillon
Qui t'envoie tout droit en prison
Dis-toi qu'il est plus mal logé
Car pour payer ta pitance
Tandis que tu f'ras pénitence
Lui qu'est si fier de t'enfermer
Faudra encore qu'il aille bosser

 

Sois fainéant, sois fainéant
Tu vivras content
Sois fainéant, sois fainéant,
L'avenir t'attend

 

Voilà c'était mon héritage
Comme tu vois j'ai fait mes bagages
Je te laisse avec ta môman
Tu perds rien, j'ai pas l'gros lot
Et tant pis pour toi si je triche
Tu s'ras p't'être un enfant d'salaud
Mais tu s'ras pas un fils de riche

 

Sois fainéant, sois fainéant
Tu vivras content
Sois fainéant, sois fainéant,
L'avenir t'attend

1 mai 2014