Ça n'a pas l'air compliqué comme ça, oui. Pourtant j'entends de plus en plus souvent des gens se tortiller la langue pour ne pas prononcer ce petit mot tout simple. 

Le maire demande à la mariée, maquillée comme un carré d'as avec sa robe de carla-du-dimanche-plus-jour-férié, si elle veux épouser machin qu'est à côté et qui s'est lavé les pognes pour l'occasion. La princesse en carton-pâte de répondre "complètement", c'est possible ça ? Elle prend le gars complètement donc si elle avait dit oui, seulement un petit oui mignon, elle n'en aurait pris qu'un bout ? Et lequel ? Ça me taraude cette affaire de morceau de marié.

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"Alors Bidule, ça fait quoi de sortir son troisième livre dans la maison Galligrasseuil, satisfait ?"  

"Tout-à fait cher journaliste... "……  D'ailleurs Bidule prononce tûtafè pour bien montrer qu'il est sorti de la cuisine à Jupiter (merci Coluche). Ça lui aurait fait quoi à sa bouche en cul-de-poule de répondre oui ?

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"T'as sorti le beurre du frigo ?" 

"Complètement"……  J'espère bien 'spèce de godiche, on ne sort pas du beurre à moitié ou au quart ! Quoique, un quart de beurre... mais non, on le sort entier bien que ce soit un quart enfin !

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Il y a des variantes moins courantes comme parfaitement.

"Vous avez demandé au garagiste de faire le nécessaire ?"

   "Parfaitement !"…… Ah, on a affaire à un expert qui s'exprime parfaitement je suppose. il a fait une demande parfaite au garagiste, la classe...

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Encore une, ambiguë, exactement, puisqu'elle peut constituer une réponse valable.

 "Vous avez voulu freiner mais ça glissait et vous avez envoyé Mémère dans les orties ?"

"Exactement"……  Là ça marche, rien à brocarder. Sauf que Mémère, elle est mal...

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"Le metteur en scène a créé votre rôle en fonction de votre jeune partenaire d'après mes informations"

"Exactement"……  Pas vraiment à côté de la plaque mais c'est un peu sous-entendu genre il est tellement nul le partenaire qu'il faut se mettre à son niveau. Avec un oui, pas de soucis !

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Mais la variante la plus horripilante c'est c'est clair.

"Tiens, y a du brouillard ce matin..."   ou pire      "Tiens, fait encore nuit..."

"C'est clair..."…… Ben non, c'est pas clair si on n'y voit rien andouille !  Sans trop appuyer sur la façon d'écrire c'est clairE en général ; deux énervements pour le prix d'un, de quoi se plaint-on !

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C'est quand même pas croyable cette épidémie et ça me semble fatigant comme exercice. Faut dire que je prononce plus souvent non que oui. Et j'y pense au fait ! Le non ne subit pas cette relégation ! Pas facile, c'est ça ? Dès qu'on veut tenter un autre mot, ça devient plus indécis tandis que non c'est non, clair, net et précis.

Oui aussi est clair, net et précis alors pourquoi le snober ? Ça engage trop c'est ça ?

Que celui qui a déjà entendu un normand prononcer la maxime rituelle à la nouvelle mode : p'tête bien que complètement, p'tête bien que non veuille bien écrire à la rédaction, merci.

22 novembre 2011

Edit du 27 novembre 2011 : une lectrice, merci Laure, me signale qu'elle a entendu une variante de non tout-à-fait étonnante. A la question "êtes-vous mariée" une jeune femme répondit pas du tout !  Elle aurait donc pu être mariée un peu ? Beaucoup ? 

 

 

Lire au quotidien.

Avec les méthodes modernes, il me semble que je lis de plus en plus. A part les journaux et les livres je veux dire. Dans la vie quotidienne comme elle va, j'ai commencé à lire des télex. Qui se souvient de cette machine magique et encombrante qui faisait un bruit hystérique en tremblotant, nous sortait un petit papelard dont les mots venaient de loin souvent, bien au-delà des coins de notre hexagone ? Y en a-t-il encore de ces outils de communication ?  Sais pas.... La grosse machine bruyante a dû laisser la place à une petite télé moche qui ne fonctionnait pas trop mal mais ça n'avait pas la magie du télex le Minitel et puis ça ne crachait pas un petit papier, le nôtre non en tout cas. Fallait penser à consulter et prendre note. Et puis c'était franco-français, pas de rêverie possible. Et maintenant, alors là maintenant c'est le top du top, le pompon doré sur tranche -quoi ? Un pompon n'a pas de tranche ? Ah.... on m'aura trompée- l'internet ! Non seulement on lit ses messages tous les matins mais on tartine des pages comme je le fais à l'instant. Lire, lire, lire et encore lire.... Ça me plaît. Je cause écrit quand j'ai envie et le temps et la frite, vous lisez de même.

Je peux envoyer à sept heures du mat' un message à un lève-tard qui me répondra à minuit et demi, c'est bien d'autant que je n'aime pas, n'ai jamais aimé le téléphone. Et puis par téléphone, je ne peux pas envoyer une photo, un document, un dessin, une connerie quelconque qui va faire sourire mon interlocuteur un instant.

Comme pour les médailles, il y a un avers et un revers, dommage. Pourquoi donc que l'inventeur des médailles n'a pas pensé à cet inconvénient majeur, une face eut suffit à grandement nous simplifier la vie ! Comment ça, c'est pas possible  ? Gros manque d'imagination et pis c'est tout, ah mais !... Hummm.... je reviens à mon mouton revers. La moindre des choses quand on écrit est d'être lu, que quelqu'un quelque part déchiffre les signes pour en faire dans sa tête du signifiant. Bien, bien, bien mais ça ne marche pas à tous les coups ! Je me demande si ce n'est pas l'immédiateté technique qui provoque la lecture diagonale et la compréhension biaisée qui va avec. A l'instant, je viens encore d'en avoir la preuve : je me décide à vendre tout mon matériel d'équitation, un crève-cœur. Je poste une annonce où ça va bien sur la toile en précisant expressément que les prix sont fermes, que je n'envoie pas, qu'il faut payer à l'enlèvement. Que croyez-vous qu'il arrivât ? Tous les intéressés me demandent soit d'envoyer, soit marchandent, soit les deux à la fois ! Mais qu'est-ce qu'ils ont lu nom d'une pipe en bois d'arbre ! C'est bien la peine que je me sois cassée la nénette pour faire court et concis, arf...

Et la prochaine fois que je réponds à côté de la plaque à quelqu'un, je vais me pendre un p'tit quart d'heure manière de méditer le papier que je viens d'écrire.

18 novembre 2011

 

 

C'est bien le jour, 11 novembre. 2011 de surcroît, 11-11-11 pour amuser les numérologues et autres rigolos pourvoyeurs de billevesées. A l'origine, c'est aux gars envoyés au champs d'horreur de 14-18 qu'était destinée cette cérémonie célébrée en grande pompe par le pays. La der des der.... arf.....

Maintenant le chef voudrait nous faire avaler qu'il faut commémorer tous les morts envoyés au combat par la patrie. Ah bon ? Toutes les guerres seraient donc les mêmes ? 14-18, on envoie des conscrits par milliers se faire trouer de la manière la plus barbare qui soit pour sauvegarder des intérêts planqués à l'arrière comme le populo l'avait bien compris à l'époque. 39-45, on envoie au casse-pipe des mecs à cheval contre des tanks, c'était contre une occupation dictatoriale, une extermination de masse, pas pareil quand même. Indo et Algérie c'est encore et toujours de pauvres hères qui sont envoyés contre l'autochtone forcément traître et vicieux ; colonial tout le truc, rien à voir avec les précédentes. A l'instant c'est en Afghanistan que des français (entre autres) cassent la pipe, des militaires engagés pour aller péter du bougnoul pour le plus grand plaisir d'une poignées de gros intéressés à mettre la pogne sur ce coin de planète.

Pour faire court hein..... Et parce que ce n'est pas à moi de développer, un tas de gens très compétents ont travaillé sur le sujet, z'avez qu'a vous renseigner.

Faudrait donc mélanger tous ces morts ; les uns conscrits happés par la république pour sauvegarder les aciéries et l'industrie qui va avec, les suivants tout aussi conscrits à l'appel de la liberté et du refus de la dictature avant le piteux armistice, les suivants dont encore des conscrits, aux ordres des colons cousus d'or pour fondre sur le dos des anamites et des ratons comme ils les nommaient si délicatement, enfin les derniers ceux d'aujourd'hui qui sont des professionnels, qu'ont signé leur engagement et qui savent à quoi s'en tenir en matière d'accident du travail.

Ça ne me dit rien qui vaille cet amalgame, si je pouvais chanter sans faire fuir tous les êtres vivants à dix lieues à la ronde, c'est Craone que je chanterai aujourd'hui :

 

Quand au bout de huit jours, le r'pos terminé
On va reprendre les tranchées,
Notre place est si utile
Que sans nous on prend la pile,
Mais c'est bien fini, on en a assez
Personne ne veut plus marcher,
Et le cœur bien gros comm' dans un sanglot
On dit adieu aux civ'lots,
Même sans tambours, même sans trompettes
On s'en va là-haut, en baissant la tête.

 

Refrain :
Adieu la vie, adieu l'amour,
Adieu toutes les femmes
C'est bien fini, c'est pour toujours,
De cette guerre infâme,
C'est à Craonne, sur le plateau
Qu'on doit laisser sa peau,
Car nous sommes tous condamnés,
Nous sommes les sacrifiés.

 

Huit jours de tranchées, huit jours de souffrances,
Pourtant on a l'espérance,
Que ce soir viendra la relève
Que nous attendons sans trêve.
Soudain dans la nuit et dans le silence
On voit quelqu'un qui s'avance,
C'est un officier, un chasseur à pied
Qui vient pour nous remplacer.
Doucement dans l'ombre sous la pluie qui tombe,
Les petits chasseurs vont chercher leur tombe.

C'est malheureux d'voir sur les grands boulevards
Tous ces gros qui font la foire
Si, pour eux la vie est rose,
Pour nous c'est pas la même chose.
Au lieu de s'cacher, tout ces embusqués
Feraient mieux d'monter aux tranchées
Pour défendre leur bien car nous n'avons rien
Nous autres, les pauvres purotins
Tous les camarades sont enterrés là
Pour défendre les biens de ces messieurs là.

 

Dernier refrain:
Ceux qu'on l'pognon, ceux-là r'viendront
Car c'est pour eux qu'on crève.
Mais c'est fini, car les troufions
Vont tous se mettre en grève.
Ce s'ra votre tour, messieurs les gros
De monter sur l'plateau:
Car si vous voulez la guerre
Payez-là de votre peau !

 
11 novembre 2011